
05 Juil Les crises : détresse ou ruse?
Il fait le bacon, il pleure, il morve, il crie, il tape, il « garoche », il brise…
Les crises: un comportement normal.
Un peu plate à dire, mais les situations de crises sont « normales » et ce que tu sois un bon parent ou non. Elles font parties du développement de l’enfant et même s’ils en font tous, chacun s’y adonne à sa « sauce perso».
En effet, l’intensité, la fréquence, les motifs et les comportements seront propres à chacun.
Oui, mais, pas toujours facile de bien agir.
Malgré qu’on sache que ce soit « normal », c’n’est pas pour autant plus facile de les accompagner.
On peut même en venir à se demander si notre enfant a un sincère « problème » ou s’il est carrément en train de nous « niaiser ».
Les bons parents sont-ils à l’abri des crises?
La réponse est claire. Non. Les bons parents ne sont pas à l’abri. Sauf que…
La différence entre le bon parent et le moins bon, est celui qui ne cède pas à l’enfant plutôt que d’acheter la paix, celui qui intervient plutôt que celui qui fait l’autruche, celui qui est conséquent plutôt que celui qui est du genre laissé aller…Celui qui est en mode éducation plutôt que celui qui est en mode « casser ».
Sans le moindre doute, de bonnes habitudes éducatives réduiront probablement et considérablement les crises ou du moins leur durée et leur intensité et ce, en plus d’outiller l’enfant à mieux gérer ses émotions.
Ceci étant dit, à chaque type de crise, une approche d’intervention est à privilégier pour s’en sortir.
Manipulation et caprice, est-ce possible?
On parle rarement de manipulation et de caprices avec de jeunes enfants, car il est totalement faux de croire qu’un bébé a des caprices ou qu’il manipule. Il est aussi rarement vrai que ce soit en toute conscience qu’un enfant ait l’intention de manipuler son parent. Cependant, un enfant peut adopter un comportement par évitement, par confrontation, par opposition, par frustration, etc.
Marianne 5 ans est retirée d’un jeu de groupe alors qu’elle a reçu plusieurs avertissements sur sa conduite. Au moment où la conséquence est appliquée, elle éclate en pleurs, bouscule le matériel, tape du pied, grogne et accuse les autres de son malheur. Elle pleure et veut détruire le jeu des autres. Dès que l’adulte veut l’encadrer, elle crie de colère et négocie.
Léa 4 ans est tombé du module et s’est blessée le genou. Elle pleure intensément. On a beau essayer de la calmer et de la raisonner, elle est « déconnectée ». Elle ne répond à aucune question, n’est réceptive à aucune méthode d’apaisement…La crise est si intense qu’elle devient dysfonctionnelle. Tout autre activité doit être interrompue pour lui apporter du support, mais elle n’accepte aucune forme d’aide et la crise s’étire de manière démesurée. Elle est envahie par la pensée de « son bobo ».
Deux types de crises, deux façons d’intervenir.
Il y a la « crise détresse ». L’enfant est vraiment bouleversé, démuni. Son trop plein d’émotions l’empêche de parler, de raisonner, d’agir. Il est « déconnecté ». Il est visiblement envahi par une « souffrance ». Il pleure intensément et n’arrive pas à reprendre le dessus. Il recherche du réconfort immédiatement auprès de sa doudou, toutou, parent, etc.
Il y a la « crise ruse/contrôle ». L’enfant agit pour prendre le contrôle. Il a une requête. C’est souvent là que les parents ont l’impression que leur enfant les « manipule ».
On reconnaitra plus facilement ce type de crise par notre propre réaction.
« Qu’est-ce que tu veux? » (contrôle/ il veut obtenir quelque chose)
« Ça ne va pas? » (détresse/il a mal, il a peur, etc.)
L’enfant qui est en recherche de contrôle est encore assez « connecté » pour argumenter, répliquer et exiger. Il sera capable d’avoir des contacts visuels et il sera conscient de ce qui l’entoure. Par exemple, il choisira de faire tomber une chaise, mais il l’a retiendra quand même un peu, en observant la réaction de l’adulte…Il voudra donner un coup de pied, mais il retiendra son geste juste assez pour seulement effleurer l’adulte.
L’enfant en crise de type « ruse » est plus dans la colère/sentiment d’injustice que dans la tristesse/douleur de l’enfant en crise de type « détresse ».
Quelles stratégies sont à privilégier?
Crise « détresse »
On aide l’enfant à prendre des moyens pour retrouver son calme et résoudre le problème d’une meilleure façon. On apporte un certain réconfort, mais on dose l’attention qu’on y accorde. On trouve l’équilibre entre écoute et bienveillance vs moyens et solutions. On devient un guide calme, mais ferme qui montre la direction à l’enfant pour gérer ses émotions (c’est là qu’on pourrait sortir nos trucs de respirations, images d’émotions, balle anti-stress, musique, etc.). Même si l’enfant vit intensément une émotion, il doit apprendre à « redescendre » et passer à autre chose. Gérer les émotions, ce n’est pas inné. C’est un apprentissage. Pas un caprice. Ça nécessite beaucoup d’entraînement pour l’enfant et de la compréhension/patience de la part des parents.
Crise « ruse »
On est ferme. On donne une limite claire. On maintient les règles. On répète et on donne des choix gagnant-perdant pour que l’enfant se responsabilise. Le réconfort est très dosé. On peut exprimer une certaine empathie, l’aider à mettre des mots sur sa colère/sa peine, mais en limitant l’attention qu’on lui donne.
Ce n’est pas le temps de chercher à tout prix à ce qu’il se sente mieux et qu’il obtienne ce qu’il veut. Ce n’est pas le temps de négocier ou d’avoir recours à du chantage tel que « si tu arrêtes de faire la crise, j’te donne ceci ou tu auras cela ». Vous lui donnerez le pouvoir qu’il vous revendique et ce serait une grande erreur…Vous ouvrirez la porte à bien d’autres crises. Le seul moyen pour vous en sortir, c’est de maintenir votre limite claire, des choix restreints et répétez la même cassette.
L’enfant-roi.
Si vous commencez à ignorer les crises et à céder à ses nombreuses demandes, vous fabriquerez un enfant-roi. Ça non plus ce n’est pas inné. L’enfant ne naît pas roi, il le devient.
Un enfant-roi, c’n’est pas seulement l’enfant qui fait la crise pour un non. C’est celui qui tolère très mal toutes les limites qu’on lui impose parce qu’on ne lui en a pas assez imposé ou qu’on lui a toujours donné raison … S’il est persuadé d’être le chef de la meute, c’est qu’on l’a laissé l’être.
Passer des règles aux valeurs.
Le parent doit inspirer le respect tout comme il doit travailler fort pour donner un sens aux règles et aux conséquences qu’il applique en fonction des valeurs familiales.
Au départ, les enfants obéissent par peur d’être réprimandé, pour faire plaisir à leur parent ou par recherche d’amour et de reconnaissance. Cependant, la grande mission éducative est que les valeurs deviennent un guide intrinsèque chez nos enfants. On ne s’excuse pas seulement parce qu’on le demande, mais parce que ça réconforte l’autre et qu’il est important de reconnaître nos erreurs. On ne rend pas service seulement parce qu’on le demande, mais parce que l’entraide et la coopération sont importantes. On ne range pas seulement parce qu’on le demande, mais parce qu’on est responsable et autonome. Etc.
Chaque enfant est unique.
Il y a des stratégies universelles qui aideront la plupart des enfants, mais il n’en reste pas moins qu’il faudra toujours comprendre ce qui se cache derrière une crise/un comportement qui se répète sans cesse, qui ne passe pas avec le temps, qui revient toujours peu importe ce qu’on fait.
Il faudra, parfois, aller voir au-delà des apparences. Un regard neutre et extérieur est alors un bon coup de pouce.